
« Apollo 14 effectuait son voyage de retour. La mission avait été un succès, et je n’avais plus grand-chose à faire. Je pouvais jouer les touristes et regarder par le hublot. La capsule était perpendiculaire au plan de l’écliptique, en rotation pour maintenir l’équilibre thermodynamique : toutes les deux minutes, je pouvais voir la Terre, le Soleil, la Lune, les étoiles et un panorama complet des cieux, parsemés d’étoiles. En raison du manque d’atmosphère, elles étaient dix fois plus nombreuses et brillantes qu’observées par temps clair depuis la Terre. C’était vraiment féérique.
C’est alors que j’ai vécu une connexion entre mes molécules et les étoiles. J’avais jusqu’à présent considéré cela par le prisme de ma formation en astronomie à Harvard et au M.I.T. Je savais que les molécules qui composaient le vaisseau spatial, le corps de mes collègues et le mien, étaient originaires d’anciennes étoiles. Mais dans la capsule, cette connexion n’était pas intellectuelle, elle était viscérale.
Un sentiment d’extase et de bien-être me submergeait complètement. Je n’avais jamais rien ressenti de tel. Cela a continué jusqu’au retour sur Terre : durant trois jours, à chaque fois que je regardais par le hublot, la sensation de ne faire qu’un avec l’univers, l’extase, revenaient, avec autant d’intensité. Et avec elles une excitation, une joie bouillonnante, un sentiment de bonheur et d’émerveillement, qui me saisissaient quand je regardais les cieux et que, submergé par la beauté, je laissais libre cours à cette émotion. La présence de la divinité devenait presque palpable, et j’ai compris que la vie dans l’univers n’était pas due à un processus aléatoire... Cette compréhension était évidente pour moi.
La plupart d’entre nous [les astronautes] ont eu des expériences de ce type. Il y a un livre intitulé The Overview effect *, qui évoque ce qui se passe lorsqu’on considère la Terre dans cette perspective. Vues d’en haut, les frontières qui sont la cause de tant de conflits sont invisibles. Et plus la Terre devient petite dans l’immensité des cieux, plus l’expérience devient profonde.
J’aime à dire que nous sommes partis dans l’espace en techniciens et en sommes revenus humanistes, capables de voir l’unité de l’humanité, l’unité de la Terre comme système vivant, tout en étant plus pacifiques et moins violents. Cela ne veut pas dire qu’on ne se met plus en colère ; mais on apprend à vivre en paix avec son environnement, la nature, ses voisins. Apprendre à aimer et à voir l’harmonie de la nature, voilà le point fondamental. »
Ce qui me touche dans son expérience c’est cette vision globale de l’univers incluant l’homme. Nous ne sommes pas séparés de cette totalité mais c’est un tout. Et cette prise de conscience génère un bonheur immense et une paix indescriptible. De nombreux scientifiques sont arrivés à la conclusion qu’il existe un principe intelligent qui créé et gouverne la totalité de l’univers et nous en faisons intégralement parti. Je reste persuadée que nous pouvons ressentir cette unité complète, ce Tout-en-un, en ouvrant notre pensée à l’infinité, en refusant résolument tout ce qui veut nous limiter. C’est un travail de chaque instant, et la clé, comme le dit clairement Edgar Mitchell c’est d’apprendre à aimer.
Une fois revenu sur terre, Edgar Mitchell a ressenti le besoin impérieux de comprendre ce qui s’était passé. Ce qui l’a conduit deux ans plus tard à fonder The Institute Noetic Sciences pour encourager et conduire une recherche sur les potentiels humains. Les programmes de l'institut incluent l'amélioration des capacités humaines, la santé intégrale et la guérison, et l'émergence de visions mondiales.
Cette recherche inclut des sujets tels que la rémission spontanée, la méditation, la conscience, les pratiques de médecine non conventionnelle, la spiritualité, le potentiel humain, les capacités psychiques et la survie de la conscience après la mort physique, parmi d'autres.
* Il existe également une vidéo en anglais qui présente The Overview effects